
Logiciels malveillants, hameçonnage, ransomwares, fuites de données... les cybermenaces se multiplient à un rythme soutenu. En France, les divers "incidents de sécurité" notifiés à l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi) ont ainsi bondi de 84 % entre 2022 et 2024, selon les données issues de ses "Baromètres Cyber".
Si les grandes structures sont régulièrement visées, les PME, TPE et collectivités ne sont pas épargnées. Pire : elles sont souvent plus vulnérables, car moins bien préparées. Face à ce constat, les solutions purement techniques (antivirus, pare-feu) ne suffisent plus. L’humain reste la première ligne de défense. Une erreur de clic, une mauvaise gestion des mots de passe, un document sensible envoyé par mégarde, et c’est toute l’entreprise qui peut se retrouver paralysée. Dès lors, il est indispensable de former les collaborateurs pour les rendre acteurs de la sécurité informatique. Cette démarche dépasse le simple cadre technique : il s’agit de construire une véritable culture cyber, partagée par tous.
La formation en cybersécurité, une réponse aux nouvelles formes d’attaques
Les cyberattaques sont de plus en plus sophistiquées, ciblées, et psychologiquement manipulatrices. Les cybercriminels ne se contentent plus de pirater les failles techniques : ils exploitent l’humain, ses compétences techniques, ses petites habitudes, ses moments de distraction, ainsi que ses émotions. Parmi les méthodes les plus répandues figure le phishing (ou hameçonnage), qui consiste à inciter un collaborateur à cliquer sur un lien ou à ouvrir une pièce jointe piégée, souvent via un mail imitant une communication officielle. Ces attaques sont redoutables : selon IBM, 90 % des incidents de cybersécurité ont pour origine une erreur humaine.
Or, sans formation adaptée, peu de salariés sont capables de détecter ces pièges. Les messages sont bien rédigés, les logos sont copiés, les prétextes sont crédibles. Une formation pratique permet d’apprendre à repérer les signaux faibles : adresse email suspecte, demande inhabituelle, pièce jointe en .exe, urgence factice…
Exemple typique : Une petite entreprise familiale de menuiserie a vu son système informatique paralysé pendant deux semaines après qu’un collaborateur a ouvert un fichier piégé reçu par mail. Ne disposant pas de sauvegardes régulières, l’entreprise a finalement dû payer une rançon, en plus de subir des retards de commandes et une perte de clients. Une simple formation aurait pourtant permis d’éviter cette situation…
Former ses équipes, c’est donc leur donner les moyens de comprendre les risques, d’identifier les tentatives malveillantes et de réagir efficacement. Cela comprend également les bonnes pratiques à adopter en cas d’incident : qui alerter ? Quelles sont les données à isoler ? Quelles sont les erreurs à éviter après l’attaque ?

Il faut impliquer tous les métiers, pas uniquement les experts IT !
Longtemps, la cybersécurité a été perçue comme un sujet réservé aux informaticiens. Pourtant, dans les entreprises, de plus en plus numérisées, chaque collaborateur est une porte d’entrée potentielle. Comptabilité, ressources humaines, service client, logistique, direction générale… tous les métiers sont concernés, car tous utilisent des outils numériques, échangent des données ou communiquent avec l’extérieur.
Il ne s’agit donc pas uniquement de sensibiliser les techniciens, mais bien l’ensemble des équipes. Et cela commence dès leur intégration : former les nouveaux arrivants aux bons usages numériques, à la politique de sécurité interne, au RGPD (Règlement général sur la protection des données), etc. Ensuite, des sessions de mise à jour régulières doivent être organisées pour maintenir le niveau de vigilance et intégrer les évolutions des menaces.
Les managers ont également un rôle clé. En tant que relais de la culture d’entreprise, ils doivent montrer l’exemple, être garants des bonnes pratiques, et savoir accompagner leurs équipes en cas de doute. Il y a de cela plusieurs années, chez le cabinet d’expertise comptable Afigec, un collaborateur a reçu un email contenant une pièce jointe malveillante. Mais, grâce à une sensibilisation aux risques numériques, il a immédiatement alerté le service informatique. L’accès réseau a été coupé dans les minutes suivantes, évitant ainsi toute propagation du virus. Ce réflexe, simple, mais essentiel, démontre l’utilité d’une formation data même basique pour protéger toute l’organisation !
Former tous les métiers, c’est donc transformer un risque diffus en compétence collective, où chacun devient acteur de la sécurité de l’entreprise.
Renforcer la culture d’entreprise autour de la cybersécurité
Instaurer une culture de cybersécurité ne se limite pas à des formations ponctuelles. Il s’agit d’un travail de fond, régulier, cohérent avec les valeurs de l’entreprise. Cela passe donc par la mise en place de réflexes simples, mais puissants : verrouiller sa session en quittant son poste, utiliser des mots de passe complexes, activer la double authentification, accorder une attention particulière aux appareils personnels connectés au réseau de l’entreprise, ne pas transmettre d’informations sensibles sans vérification…
Une culture cyber efficace repose sur trois piliers : compréhension, responsabilisation et répétition. Il ne suffit pas de comprendre les enjeux, il faut aussi et surtout s’approprier les bons comportements, les adopter au quotidien, et les réactiver dans le temps grâce à des campagnes de rappel, des quiz, des mises en situation.
En rendant la cybersécurité concrète, compréhensible et accessible à tous, on évite qu’elle soit vécue comme une contrainte ou un jargon réservé aux techniciens.
Un investissement rentable à court et long terme
La formation à la cybersécurité représente un investissement stratégique, et n’a rien d’une dépense accessoire. Contrairement aux idées reçues, les petites structures sont des cibles privilégiées : elles ont moins de ressources, des outils mal sécurisés, et un personnel peu formé. Résultat : les attaques réussissent plus facilement, avec de graves conséquences.
Selon un récent rapport sénatorial, dans le secteur privé, le coût moyen d’une cyberattaque est de 466 000 euros pour les TPE/PME, et de 13 millions d’euros pour les ETI. Ces chiffres comprennent à la fois les pertes d’exploitation, les frais de réparation, les rançons versées, les coûts juridiques, sans oublier l’impact sur l’image de l’entreprise. À titre de comparaison, le coût d’un programme de formation est très inférieur, et se finance via le plan de développement des compétences, les OPCO, ou des aides publiques.
Former, c’est aussi limiter les erreurs qui nécessitent ensuite des interventions lourdes et coûteuses en data protection. C’est éviter les sanctions liées au non-respect du RGPD. C’est rassurer les clients, les partenaires et les fournisseurs. Et c’est fidéliser les collaborateurs, dans leur environnement de travail.
Par ailleurs, il existe de nos jours des outils simples, comme les campagnes de phishing simulées, les vidéos pédagogiques ou les ateliers interactifs, permettant d’apprendre de manière ludique et engageante, sans devoir investir des moyens importants.

À l’heure où une simple erreur de clic peut paralyser une entreprise entière, former ses équipes à la cybersécurité n’est plus une option, mais un besoin vital. Derrière chaque attaque réussie, il y a souvent un collaborateur non préparé. Et derrière chaque incident évité, un salarié attentif, formé, vigilant. Investir dans la formation, c’est investir dans l’intelligence collective. C’est donner à chacun les moyens de protéger l’entreprise, d’identifier les signaux faibles, et d’agir au bon moment.